L’acte de parole chez John L. Austin : quand dire, c’est faire

Introduction
La pragmatique linguistique explore les usages du langage au-delà de sa simple dimension descriptive, en étudiant comment les énoncés peuvent produire des actes. John L. Austin, philosophe britannique, est une figure centrale dans ce domaine. Son œuvre How to Do Things with Words (Quand dire, c’est faire) révolutionne la compréhension du langage en introduisant les concepts d’actes de langage et de la performativité. Cet article s’attache à examiner ses idées fondamentales, en mettant en lumière leur impact sur la linguistique et la philosophie du langage.
Chapitre 1 : Énoncés constatifs et performatifs
Définir les types d’énoncés
Dans son ouvrage majeur, Austin distingue deux types principaux d’énoncés :
- Les énoncés constatifs : Ils décrivent un état de fait et sont évaluables comme vrais ou faux. Par exemple : La Terre est ronde.
- Les énoncés performatifs : Ils réalisent une action par leur énonciation. Ces énoncés ne sont ni vrais ni faux mais plutôt « réussis » ou « malheureux ». Exemples :
- Je vous déclare mari et femme (prononcé lors d’une cérémonie).
- Je promets de venir demain.
La performativité en contexte
Austin souligne que la performativité dépend du contexte. Par exemple :
- La séance est ouverte est performatif lorsqu’énoncé par le président d’une réunion, mais devient constatif lorsqu’un journaliste le rapporte.
Les limites de la distinction
Austin reconnaît que certains énoncés sont hybrides, oscillant entre constatif et performatif. Il abandonne cette dichotomie stricte pour introduire les concepts d’actes locutoires, illocutoires et perlocutoires.
Chapitre 2 : Les trois dimensions de l’acte de parole
Actes locutoires, illocutoires et perlocutoires
Austin propose une analyse plus fine des actes de langage en distinguant :
- Acte locutoire : L’acte de dire quelque chose (production de sons, construction grammaticale, attribution de sens).
- Acte illocutoire : L’acte accompli en disant quelque chose, comme une promesse ou un ordre.
- Acte perlocutoire : Les effets produits sur l’auditeur, tels que persuader, effrayer ou apaiser.
Exemple :
- Je promets de venir demain :
- Locutoire : Production de mots ayant une signification claire.
- Illocutoire : Réalisation d’une promesse.
- Perlocutoire : Rassurer l’auditeur sur la venue.
Les critères de « bonheur » ou de « malheur »
Pour qu’un énoncé performatif réussisse, plusieurs conditions doivent être réunies :
- Le locuteur doit avoir l’autorité ou la légitimité pour accomplir l’acte.
- Le contexte doit être approprié.
- Les mots employés doivent correspondre à l’acte visé.
Par exemple, Je vous marie n’aura de valeur performative que si elle est prononcée par un officier d’état civil dans le cadre d’une cérémonie officielle.
Chapitre 3 : Les implications théoriques et critiques
Les classes d’actes illocutoires
Austin identifie plusieurs catégories d’actes illocutoires, notamment :
- Les verdictifs : Exprimer un jugement (ex. : acquitter, condamner).
- Les exercitifs : Exercer un pouvoir ou un droit (ex. : ordonner, nommer).
- Les promissifs : S’engager à faire quelque chose (ex. : promettre, jurer).
- Les comportatifs : Exprimer une attitude sociale (ex. : remercier, féliciter).
- Les expositifs : Clarifier ou expliquer une idée (ex. : affirmer, nier).
Ces distinctions mettent en lumière la diversité des fonctions du langage.
Critiques et prolongements
Si Austin ouvre la voie à une compréhension dynamique du langage, certains aspects de sa théorie soulèvent des questions :
- Les ambiguïtés performatives : Certains énoncés semblent performatifs ou constatifs selon le contexte.
- Les critiques de Benvéniste : Ce dernier considère que seuls certains énoncés remplissent pleinement les critères de performativité.
Malgré ces limites, les concepts d’Austin inspirent des approches comme celle de John Searle, qui intègre la performativité dans une théorie plus large des actes de langage.
Questions fréquentes
1. Qu’est-ce qu’un acte performatif selon Austin ?
Un acte performatif est un énoncé qui réalise une action en étant prononcé, comme une promesse ou une déclaration officielle.
2. Quels sont les critères de réussite d’un énoncé performatif ?
Un énoncé performatif est réussi si le locuteur est légitime, le contexte est approprié, et les mots correspondent à l’acte visé.
3. Quelle est la différence entre acte locutoire et acte illocutoire ?
- L’acte locutoire concerne le fait de dire quelque chose (forme et sens).
- L’acte illocutoire est l’action accomplie en disant quelque chose (ordre, promesse, etc.).
Conclusion
John L. Austin a transformé notre compréhension du langage en montrant qu’il ne se limite pas à décrire la réalité, mais qu’il peut aussi la transformer. Son concept de performativité reste un pilier fondamental de la pragmatique linguistique et continue d’influencer la philosophie du langage et les sciences sociales.
Points-clés de l’article
- “Un énoncé performatif accomplit une action simplement par le fait d’être prononcé dans les conditions adéquates.”
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